Dernière mise à jour le 13 octobre 2015
La partition du Soudan a été décidée le 9 juillet 2011, aux premiers frémissements du « printemps arabe », au mépris du principe de l’intangibilité des frontières issues de la colonisation en vue de priver la Chine d’un de ses principaux ravitailleurs énergétiques africains et d’aménager une plate-forme opérationnelle à Israël dans le périmètre du Nil dans une alliance de revers avec les pays de l’Afrique noir anglophone non musulmans (Kenya, Ouganda).
Le Darfour, puis le sud-Soudan, ont servi de contre-feux médiatique à Gaza en vue de détourner l’attention de l’opinion internationale sur les destructions répétitives de l’enclave palestinienne par l’armée israélienne. L’un des plus importants collecteurs de fonds au profit du Sud Soudan, à son indépendance, a été Thierry Leyne, agent du Mossad et associé de Dominique Strauss Khan, qui s’est suicidé en 2014 à la suite de sa déconfiture financière. Les deux plus fermes partisans de la partition du Soudan ont été les deux Bernard: l’humaniste tiers mondain Bernard Kouchner et le botuliste mondain Bernard Henry Lévy.
Le zèle partitioniste des deux philo-sionistes a abouti à faire que « L’indépendance du Soudan du Sud est devenue l’une des pires tragédies de notre temps », selon le constat de l’universitaire israélien Idan landau, auteur de cette analyse.
L’indicible histoire des exportations militaires israéliennes au Sud-Soudan
Par Idan Landau
Avec l’aimable autorisation d’El Correo de la diaspora latino-américaine. http://www.elcorreo.eu.org/
Depuis l’indépendance du Soudan, Israël a assuré une assistance multiforme à l’état sécessionniste (vente d’armes, formation militaire, sécurité intérieure technologie de surveillance. Mais le hic est que ces armes et d’une manière générale l’ensemble de son assistance technique est utilisée par les dirigeants du sud soudan pour commettre des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.
Nous savons maintenant que dans la décennie 1990, Israël a vendu des armes au Rwanda, alors que le génocide était une pratique répandue dans tout le pays. Les détails de ces affaires continuent à rester secrets. Une pétition, en hébreu, est en cours d’examen devant la Cour suprême pour que ces détails soient rendus publics. Cependant, il semble qu’aucune leçon n’ait été tirée de cette affaire.
Durant les 18 derniers mois, une guerre civile sanglante a fait rage dans un autre pays africain, le Soudan du Sud au cours de laquelle des Crimes de guerre suffisamment documentés et de possibles Crimes contre l’humanité ont été commis. Les médias israéliens ont donné des informations à ce sujet au début du conflit, mais depuis lors le silence est la norme bien que des atrocités continuent à être commises.
Il est probable que ce silence a une bonne excuse : de hauts fonctionnaires du gouvernement et l’industrie de la sécurité sont derrière la vente d’armes, la formation militaire, la sécurité intérieure et la technologie de surveillance pour les factions belligérantes au Soudan du Sud. Toute information sur ces activités pourrait les mettre dans l’embarras.
Dans la décennie 1960, Israël a été impliqué dans une guerre secrète au sud Soudan. Il a soutenu les rebelles qui luttaient pour se libérer du pouvoir de Khartoum. L’aide d’Israël ne reflétait pas les valeurs humanistes de solidarité, ni les considérations concernant une lutte juste légitime pour la liberté, mais répondait à une variété d’intérêts stratégiques dans la région.
En 2011, après une forte pression de la communauté internationale, un référendum au Sud-Soudan a eu lieu. 99% de la population a voté en faveur de la sécession de Khartoum. Le 9 juillet 2011, le Sud-Soudan est devenu un État indépendant. L’état d’Israël a été l’un des premiers pays à reconnaître le nouvel État en 2011, suivi dans la foulée d’une visite officielle de Salva Kiir Moyardit, président du Sud-Soudan, en Israël.
Pour Israël, un Sud-Soudan indépendant était une occasion en or de promouvoir ses intérêts dans la région par rapport à sa propre sécurité et son économie. Par conséquent, il a investi massivement dans l’infrastructure civile et militaire dans ce pays. La relation entre les deux pays est exceptionnelle. Même en comparaison avec les liens étroits qu’Israël entretient avec d’autres pays africains, cette relation présente certaines caractéristiques de parrainage.
Cette relation particulière doit être comprise dans le contexte de la lutte pour le pouvoir dans la région. Le conflit local entre le Soudan et le Sud Soudan est financé respectivement par l’Iran et Israël. Alors que l’Iran a renforcé ses liens avec les musulmans du Soudan, Israël a renforcé ses relations avec Sud Soudan chrétien, qui le fournit également en pétrole. Il y a deux ans et demi, Israël a apparemment bombardé à Khartoum une usine d’armement d’appartenance iranienne.
Il y a un an, les forces de défense israéliennes ont intercepté un cargo transportant des munitions en provenance du Soudan vers Gaza. En mai 2014, il a été signalé qu’un drone israélien a été abattu au Soudan. De toute évidence, l’Iran et Israël se livrent une guerre par procuration à travers leurs alliés africains.
Le seul problème est que cette stratégie semi impériale ne peut en aucun cas justifier un soutien pour les forces du Sud-Soudan qui perpétuent des crimes de guerre et contre l’humanité.
Pour empêcher la vente d’armes qui pourraient être utilisées à cet effet, aucun intérêt stratégique israélien, qu’il soit réel ou imaginaire, peut être exempté de responsabilité morale et juridique.
Triste à souligner, mais l’indépendance du Soudan du Sud est devenue l’une des pires tragédies de notre temps. Depuis le milieu de Décembre 2013, il y a une guerre civile sauvage au Sud-Soudan qui oppose deux groupes ethniques et politiques. La continuation de la guerre civile sanglante a abouti, après 22 de combat, à l’indépendance du pays. Selon des rapports récents, 50 000 personnes ont péri du fait de cette guerre, deux millions de personnes forcées à l’exode. L’on dénombre 2,5 millions de réfugiés. Les organisations des droits de l’homme et des Nations Unies estiment à 12. 000 le nombre d’enfants-soldats dans les unités militaires intégrées de défense du Sud-Soudan.
Toutes les factions en lutte -en particulier le gouvernement et ses milices alliées- sont impliquées dans des crimes de guerre, crimes contre l’humanité et violations graves des droits humains.
Aucune des parties n’a la capacité de mener la guerre à sa fin, et aucun groupe ethnique n’a une majorité claire dans le pays. La tribu Dinka [celle de Salva Kiir Moyardit], qui contrôle maintenant le gouvernement ne réunit que 35 % de la population. Certains des combattants de l’opposition sont d’anciens agents des forces de sécurité qui ont déserté pour passer de l’autre côté et emportant avec eux leurs armes et la formation militaire qu’ils ont reçue, ce qui les rend encore plus difficiles à vaincre par les forces gouvernementales. Pour ces raisons, le gouvernement a décidé une stratégie alternative : assassinats en masse, viol systématique des femmes d’autres groupes ethniques et de la violence contre les citoyens identifiés comme étant avec l’opposition. Bien que les armes continuent à affluer dans le pays, le gouvernement n’a aucun intérêt à trouver un arrangement et continue à s’accrocher au faux espoir de vaincre ses ennemis sur le champ de bataille.
La situation a conduit les pays européens à déclarer un embargo sur les armes au Sud Soudan et les Etats-Unis ont suspendu leur aide militaire. Il y a eu aussi une tentative pour faire approuver un embargo semblable devant le Conseil de Sécurité des Nations Unies. Jusqu’à présent, ces tentatives ont échoué non seulement en raison de désaccords au sein du Conseil, mais aussi par la crainte que les rebelles l’emportent sur les forces gouvernementales. Malgré les difficultés politiques existantes pour parvenir à un accord, la gravité de la situation dans le Sud-Soudan est claire pour tout le monde. Le 3 Mars 2015, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 2206 -présentée par les États-Unis d’Amérique- qui fixe aux deux parties un ultimatum, les menaçant d’un embargo sur les armes et d’autres sanctions si elles ne mettent pas fin à la lutte.
Malgré la réaction mondiale, selon les informations fournies par les militants des droits de l’homme qui ont été, ou sont encore, dans le pays, la guerre secrète d’Israël dans le sud du Soudan continue. Depuis la déclaration d’indépendance, Israël a continué à envoyer des armes, à former des forces et à offrir une variété de dispositifs technologiques liés à la sécurité. Il y a aussi la coopération entre les services secrets des deux pays et il y a des entités israéliennes qui ont mis en place et maintiennent en fonction un système de contrôle interne et de suivi efficace au Sud-Soudan.
La participation actuelle d’Israël dans le sud du Soudan est exceptionnelle dans l’histoire des exportations militaires israéliennes. Elle est, certainement, au-delà de tout calcul économique.
Aujourd’hui, Israël travaille dur pour la viabilité d’un projet dans lequel il a beaucoup investi ces dernières années, un projet qui s’il échouait, pourrait nuire à sa crédibilité auprès de dictateurs et d’autres régimes du genre à recevoir l’aide militaire israélienne.
Une publication officielle du ministère de la Défense publiée en Novembre 2014 (environ un an après le début de la guerre civile au Sud-Soudan) se vante du succès du département d’exportation lors de l’exposition Cyber sécurité, qui a été visitée par 70 délégations venant partout dans le monde, y compris du Sud-Soudan. Il est prouvé que l’armée du Soudan du Sud utilise le fusil israélien Galil ACE. Dix-huit mois après le début de la guerre civile, un quotidien soudanais a fait état d’un pont aérien entre Israël et le Sud Soudan pour transporter des missiles autopropulsés, du matériel militaire et même des mercenaires africains (après avoir été formés). Les matériels continuent d’affluer. Une délégation du Sud-Soudan va se rendre à une exposition d’armes israéliennes qui sera inaugurée la semaine prochaine à Tel-Aviv (juin 2015).
Pensez un instant à ceci : un pays qui est actuellement en train de perpétrer des crimes contre l’humanité, en utilisant des armes d’un autre pays et dans des conditions d’embargo absolu sur les armes approuvé par les États-Unis et l’Europe, a envoyé une délégation d’achats en Israël et y est accueilli à bras ouverts.
Tant le droit international que la morale de base humaine interdit la vente d’armes et de toute autre aide militaire qui peut être utilisée pour commettre des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. Dans le passé, en raison de conflits politiques liés à la guerre froide, la communauté internationale n’a pas réussi à satisfaire cette obligation, mais depuis la décennie 1990 cette politique est devenue un corps juridique crucial aux États-Unis et en Europe ; pas seulement cela, cette question a été reprise par les conventions internationales et les institutions comme les Nations Unies et les tribunaux de niveau international.
Israël n’a pas de réelle possibilité de veiller à ce que les armes vendues au Soudan du Sud ne servent pas à tuer des civils ni à menacer des femmes pendant qu’elles sont violées par des soldats ou des miliciens. En outre, il n’y a aucun moyen de garantir que la formation des forces de sécurité n’est pas utilisée pour tuer et torturer des civils et que la technologie exportée ne sert pas à persécuter des citoyens pour leur appartenance politique ou ethnique, pour ne pas mentionner le soutien à des horribles crimes de guerre et contre l’humanité, sauf à arrêter complètement toutes les exportations d’équipement militaire et de sécurité vers ce pays. Il est important de préciser que le droit international interdit également la vente de la technologie et des dispositifs qui « lancent des projectiles » s’ils peuvent être utilisés dans la perpétration de crimes de guerre et crimes contre l’humanité.
Le 12 Mars, l’avocat Itai Mack a donné une interview sur les exportations militaires vers le Soudan du Sud dans le programme de radio -en hébreu-, According to Foreign Media. (Selon les médias étrangers), diffusé par la station de radio Al For Peace. Mack a révélé les détails de l’implication israélienne dans la fourniture d’armes et d’entraînement militaire aux forces du Sud-Soudan. A partir de ses constats, le Dr Mack a demandé au Ministère de la Défense d’arrêter les exportations militaires vers ce pays. Cet appel a été rejeté; le contraire aurait été quelque chose d’incroyable.
À l’heure actuelle, Tamar Zandberg, membre de la Knesset pour le parti Meretz, tente de briser le pacte de silence qui pèse sur cette affaire en demandant au Ministère de la Défense d’arrêter immédiatement toutes les exportations militaires vers le Soudan du Sud. La demande était accompagnée d’un avis d’expert rédigé par le Dr Mack qui décrit en détail les aspects objectifs et légaux de l’affaire (qui veut lire [en hébreu] la demande et de l’opinion peuvent le faire ici).
Le public israélien doit adhérer à cette demande. Le moment de le faire est maintenant.
Idan Landau pour son blog 972mag.com
À propos de l’auteur
Idan Landau est un universitaire israélien de l’Université Ben Gourion de Néguev. Cet article a été publié (d’abord en hébreu et en anglais) pour la première fois sur le blog Idan, Ne meurs pas en imbécile ». Il a été produit avec la permission. 972mag.com. Beer-Sheva, Israël, 28 mai 2015. Traduit de l’espagnol pour El Correo par : Estelle et Carlos Debiasi. El Correo. Paris, le 15 juin 2015.
Pour aller plus loin
- http://www.liberation.fr/monde/2015/06/19/des-enfants-violes-chatres-jetes-dans-des-flammes-au-soudan-du-sud_1333029
- http://www.elcorreo.eu.org/La-triste-vie-des-enfants-soldats-dans-la-guerre-civile-du-Sud-Soudan
- https://www.madaniya.info/2015/06/21/israel-et-larabie-saoudite-deux-grands-colonisateurs-de-la-planete/
- https://www.madaniya.info/2015/02/23/senegal-sous-couvert-de-religion-la-competition-entre-israel-et-les-freres-musulmans-sur-le-plan-politique/