De l'accusation d'antisémitisme comme arme de neutralisation de toute critique à l'égard d'Israël

De l'accusation d'antisémitisme comme arme de neutralisation de toute critique à l'égard d'Israël 938 440 René Naba

Dernière mise à jour le 7 avril 2017

Ce papier a été publié le 4 janvier 2007 et réactualisé, dix ans plus tard, en avril 2017, à l’occasion de la campagne présidentielle française à l’arrière plan de la commémoration du centenaire de la Promesse Balfour.

Sur fond de criminalisation du Mouvement BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions), alors que le gouvernement israélien poursuit sa politique d’annexion rampante de la Palestine, que la classe politico médiatique française plaide pour une «israélisation» de la société française à la faveur des coups de butoir djihadistes, à l’arrière plan d’une alliance triangulaire contre nature entre les socialistes français, la dynastie wahhabite et Israël, le plus grand producteur de barbelés du monde, www.madaniya.info remet en ligne ce papier qui demeure d’actualité, dix ans après sa première publication pour faire le point des dérives.

Du Bon usage de la bible et du génocide : La terre promise et la controverse à propos de la notion du «peuple élu»

Le génocide juif n’est pas l’unique génocide du XXe siècle, ni le premier, redoutable honneur tristement revendiqué par les Arméniens de Turquie, ni le dernier (Cambodge et Rwanda 1995), ni l’unique génocide de l’histoire de l‘humanité, ni le plus important, un titre qui peut être légitimement revendiqué, de par sa durée, par les Amérindiens d’Amérique et par l’Afrique, au point de constituer, par leur ampleur, non un génocide, mais un véritable sociocide, un anéantissement de la société indigène.

Unique pays au monde, avec le Kosovo, à avoir été crée par une décision de l’ONU, Israël est aussi l’unique pays au monde à refuser de se soumettre au contrôle de la légalité internationale, un des trois pays au monde à avoir assassiné un dirigeant de premier plan de l’ONU, en mission de paix en Palestine, le comte Folk Bernadotte, un acte qui vaut à Israël d’être qualifié par le politologue américain Jeremy R. Hammond d’«État voyou» et les assassins de l’émissaire de l’ONU, de «terroristes sionistes».

Un pays spécialiste du jeu de billards à trois bandes, qui compte à son passif un lourd bilan, en termes de déstabilisation régionale, comme en témoignent les attentats anti occidentaux et anti juifs contre l’Égypte nassérienne dans la décennie 1950 (Affaire Lavon), les attentats antisémites en Irak commis par le Mossad pour forcer au départ les juifs irakiens (affaire Shulamit Cohen), dans la décennie 1960, ou encore les raids répétitifs et les assassinats extrajudiciaires tant en Palestine, qu’au Liban, dans la période 1970-2000.

Ou enfin, le déploiement d’un important réseau d’agents, y compris au sein du commandement de l’armée, doublé du noyautage du réseau des télécommunications libanais.

Sauf à considérer l’intégrisme juif plus soluble dans la démocratie que l’intégrisme musulman, comment expliquer, sinon, cette dualité de comportement en France à l’égard des principaux protagonistes du conflit israélo-arabe.

Se féliciter de la propulsion au pouvoir de la frange la plus radicale de l’extrême droite israélienne et ostraciser les formations paramilitaires arabes ou islamistes, alors que tant le Likoud que le Hamas ne prévoient pas dans leur charte, le premier, la reconnaissance de la Palestine, le second, Israël, et que les «Fous de Yahvé» auront épinglé sur leur tableau de chasse l’ancien premier ministre, Itzhak Rabin, le négociateur des accords israélo-palestiniens d’Oslo, signe patent d’une volonté de paix, une cible qu’aucun intégriste palestinien, arabe ou musulman, n’aurait jamais rêvé d’atteindre.

Le retour à Sion, la terre promise au peuple élu : Pour la première fois dans le débat public international, l’Église d’Orient a mis en question le bien fondé théologique de la mise en œuvre de la notion de «terre promise» pour «justifier le retour des juifs en Israël et l’expatriation des Palestiniens».

Sujet tabou s’il en est, cette position a été affirmée par Mgr Cyrille Salim Bustros, Archevêque de Newton (États-Unis) à l’occasion du synode des Églises d’Orient, qui est tenu du 14 au 24 octobre 2010, au Vatican. Les évêques et patriarches orientaux y affirment qu’il «n’est pas permis de recourir à des positions bibliques et théologiques pour en faire un instrument pour justifier les injustices».

«Pour nous, chrétiens, on ne peut plus parler de Terre promise au peuple juif», terme qui figure dans l’Ancien testament, car cette «promesse» a été «abolie par la présence du Christ». Après la venue du Jésus, «nous parlons de Terre promise comme étant le royaume de Dieu», qui couvre la Terre entière, et est un «royaume de paix, d’amour, d’égalité (et) de justice», a ajouté le prélat au cous de ce synode, le premier de l’histoire de la chrétienté qui se tient au Vatican, en présence des représentants de l’Islam et du Judaïsme.
( Les Chrétiens d’Orient sont les Chrétiens originels, les Chrétiens des origines de la chrétienté. Leur nombre serait de l’ordre de 13 millions de personnes, soit la population du Benelux, vivant aujourd’hui au Proche-Orient, en Turquie et en Iran. A cela s’ajoute un nombre identique dans les pays de la diaspora en Amérique du nord, en Amérique latine, en Australie et en Europe occidentale, soit un total de 26 millions de personnes ).

La présence de surcroît d’un influent lobby juif américain aux États-Unis, la première puissance militaire du Monde, se superposant à la concordance de la plus grande métropole juive au Monde avec la plus grande métropole américaine, New York, le siège des grandes banques, des grands médias et de l’industrie du divertissement, expliquent le primat du fait juif dans le récit médiatique international, la criminalisation corrélative de toute pensée critique à l’égard d’Israël et la tétanisation de son auteur.

L’affaire Gilad Shalit, prémonitoire d’une dérive pathologique vers la transposition du conflit israélo-palestinien en France

Le mutisme est complet sur ce point, refoulé au tréfonds du subconscient national, un point noir de la conscience, telle une consigne implicite, comme la marque d’une connivence entre la classe politique française et la communauté journalistique.

Le sujet fâche, car il fait tâche. Au risque de s’exposer à l’accusation d’antisémitisme, il importe toutefois d’assumer le risque de troubler la bonne conscience léthargique occidentale pour la placer face à ses responsabilités, tant il est vrai que la solidarité avec Israël, pour légitime qu’elle puisse être pour de larges secteurs de l’opinion occidentale, ne saurait occulter le débat de fond que cette question pose tant au niveau du droit que de la morale.

Un citoyen français engagé volontaire dans une armée étrangère en opération de guerre contre un peuple ami, sans mandat explicite du gouvernement français, peut-il se prévaloir de la nationalité française ?
Autrement dit, Gilad Shalit, le caporal de l’armée israélienne capturé le 25 juin 2006 par les Palestiniens, pouvait-il se prévaloir de la nationalité française et réclamer es-qualité l’intervention diplomatique du gouvernement français.

Mutatis Mutandi à l’instar des djihadistes opérant dans les rangs de Jabhat An Nosra, qui «fait du bon travail en Syrie», son engagement dans l’armée israélienne, sans mandat gouvernemental français, entraînait-t-il, sinon la déchéance de sa nationalité, à tout le moins la caducité de son droit à invoquer la protection de la nationalité française ?
La question peut paraître dérisoire au regard des enjeux de puissance que sous tend les guerres de prédation occidentales des pays arabes (Libye, Syrie) sous la séquence dite du «Printemps arabe», à l’instigation en France de Bernard Henry Lévy, le chef de file médiatique du philo sionisme exacerbé sur le continent européen.

Sauf à considérer Israël comme le fer de lance du combat occidental contre l’ensemble arabo-musulman et que son service dans l’armée israélienne constitue une forme déguisée de coopération stratégique militaire franco-israélienne, le cas du caporal Shalit se devait d’être soumis pour avis aux autorités juridictionnelles compétentes et faire œuvre de jurisprudence en ce domaine, car au delà de ce problème de droit se pose un problème de morale politique : La double allégeance justifie-t-elle la confusion juridique ? exonère t-elle de toute obligation de réserve ? Autorise-t-elle toute licence au point de constituer un «passe droit»?

Arno Klarsfeld
Dans le même ordre d’idées un binational franco-allemand qui choisit de servir le drapeau d’un pays tiers par affinité religieuse, en exerçant non une option de nationalité mais une requête en naturalisation, a-t-il vocation à assumer des fonctions de conseiller ministériel dans son pays d’origine.

Son statut de réserviste d’une armée en guerre contre un pays ami de la France à tout moment mobilisable, lui confère-t-il la quiétude suffisante dans la gestion d’un sujet aussi épineux que celui des «sans papiers». Cette situation juridiquement sinon exorbitante du moins insolite, ne le place-t-elle pas en porte-à-faux dans sa fonction, en cas de mobilisation de son armée d’affectation ?

La nomination d’Arno Klarsfeld, juriste français et réserviste de l’armée israélienne, au poste de conseiller du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy sanctionne-t-elle la carence française dans le domaine des compétences ou relève t-elle d’une manœuvre électoraliste ?

Le service militaire dans l’armée israélienne constitue-t-il désormais un passage obligé à des promotions politico administratives en France ? Préfigure-t-il la collaboration future entre les diverses composantes de l’ «axe du bien», telle qu’elle est préconisée par les néo-conservateurs américains et leurs relais français ?
Un axe constitué, selon ses promoteurs, par les États-Unis, Israël, au-delà, la droite française et le judaïsme institutionnel français, face à un «axe du mal» regroupant grosso modo le tiers monde arabo-musulman bariolé.
Les grandes civilisations se meurent des entorses répétitives qu´elles commettent à l´encontre de leurs propres principes.

À la faveur de la dégradation du climat international consécutive aux attentats anti-américains du 11 septembre 2001, de la guerre d’Afghanistan (2001-2002), de l’invasion américaine de l’Irak (2003), terreau de Daech, de la guerre israélienne contre le Liban (2006), de l’irruption du terrorisme islamiste en réplique au saccage du Monde arabe à la faveur de la mal nommée séquence du «printemps arabe» (Libye, Syrie, Soudan (2011-2017), ainsi que de la transposition du conflit israélo-arabe en France, une bataille intellectuelle à coups de censure et d’accusation de racisme fait rage dans ce pays, qui constitue à la fois le plus important foyer musulman du monde occidental et le lieu d’implantation de la plus forte communauté juive d’Europe.

La déconstruction de la «politique arabe de la France»

Certes les Juifs de France ont eu à pâtir du comportement de l’État français à leur égard. Intégré d’autorité à la nationalité française en Algérie par le Décret Crémieux, renié sous Vichy et condamné à la déportation et à l’extermination, à nouveau refoulé d’Algérie à l’indépendance de ce pays du fait du décret Crémieux assimilant les juifs aux Français, mais le comportement ignominieux de l’État Français à leur égard ne saurait justifier la substitution d’une arabophobie et d’une islamophobie à l’antisémitisme récurrent de la société française.

Si la question juive revêt une importance particulière en Europe, c’est principalement en raison du fait que les deux pays qui passaient pour les plus civilisés de l’époque -l’Allemagne et la France- ont massacré leurs propres concitoyens du fait de leur origine ethnico religieuse.

Osons l’affirmation : Si les Juifs avaient été des Iroquois d’Amérique du Nord, des Aztèques, des Incas, des Guaranis d’Amérique latine, ou encore des Zoulous, des Bassas-Bamilékés, des Songhaïs ou des Soninkés d’Afrique voire même des Arabes, particulièrement des Palestiniens, gageons que l’Occident n’aurait jamais sanctuarisé ce problème. L’orchestration d’une concurrence mémorielle sur des sujets de grandes souffrances ne relève pas de la victimologie. Elle révèle la pathologie de son auteur.

Dans ce contexte, «la politique arabe de la France» que Nicolas Sarkozy a cherché à déconstruire avec le soutien actif des transfuges atlantistes, -notamment Dominique Strauss Khan, l’ancien Directeur du Fonds Monétaire International et Bernard Kouchner, le belliciste ministre des Affaires étrangères, ancien urgentiste des zones pétrolifères (Biafra, Kurdistan, Darfour, Gabon et Birmanie)-, a surtout consisté pour les pays arabes à voler au secours de la France, à deux reprises, au cours du XXe siècle, pour l’aider à vaincre ses ennemis, notamment en 1939-1945, en l’aidant à se débarrasser du joug nazi dont une fraction importante de la communauté nationale de confession juive en a lourdement pâti.

En contrepoint et pour prix de la contribution arabe à la libération de l’Alsace-Lorraine, la France a amputé la Syrie du district d’Alexandrette pour le céder à la Turquie, son ennemi de la Première Guerre Mondiale (1914-1918), et carbonisé au napalm les habitants de Sétif, en Algérie, (1945), après la deuxième Guerre Mondiale (1939-1945) fournissant dans la foulée à Israël la technologie nucléaire du centre de Dimona (Neguev).

N’en déplaise aux nombreux intellectuels de cour qui gravitent dans l’orbite présidentielle, les trois grandes figures tutélaires du XXe siècle pour leur contribution à la morale universelle auront été, faut-il le rappeler, trois personnalités du tiers monde colonisé, le Mahatma Gandhi (Inde), Nelson Mandela (Afrique du Sud), et, pour l’espace francophone, le Martiniquais Aimé Césaire, trois apôtres de la non-violence, une consécration qui retentit comme un camouflet pour les pays occidentaux avec leur cortège de nazisme, de fascisme, de totalitarisme et d’esclavagisme.

Et, pour douloureuse qu’elle puisse être pour notre amour propre national, force nous est de relever que la France, en contrechamps, aura été le seul grand pays européen à l’articulation majeure des deux grands fléaux de l’Occident de l’époque contemporaine, «les penchants criminels de l’Europe démocratique», la traite négrière et l’extermination des Juifs, contrairement à la Grande Bretagne qui a pratiqué la traite négrière exclusivement, sans aucunement participé à l’extermination des Juifs, contrairement même à l’Allemagne qui a conçu et réalisé, elle, la solution finale de la question juive, mais sans participation à la traité négrière.

Tout au long de cette séquence, la France a été médiatiquement pro-arabe, mais substantiellement pro-israélienne. Les courbettes des dirigeants français devant les princes arabes ne doivent pas faire illusion. Fussent-elles d’un «cheval fougueux» elles sont de peu de poids face à Dimona, le symbole de la supériorité technologique et le gage de l’hégémonie militaire absolue israélienne sur l’espace national arabe depuis 70 ans.

De même la tonitruante amitié de Nicolas Sarkozy avec l’Émir du Qatar ne saurait masquer l’éradication systématique de toute sensibilité pro-palestinienne de l’administration préfectorale (Bruno Guigue) et de l’audiovisuel extérieur (Richard Labévière) et la promotion concomitante de personnalités au philo sionisme exacerbé.

La liste est longue qui va de Bernard Kouchner (Quai d’Orsay), à Pierre Lellouche (Affaires européennes), à Dominique Strauss Khan (FMI), à Arno Klarsfeld (Matignon) et François Zimmeray, ancien vice-président de la commission d’études politiques du CRIF, Ambassadeur pour les Droits de l’homme, en passant par Christine Ockrent (pôle audiovisuel extérieur), Philippe Val (France inter), à la toute dernière recrue Valérie Hoffenberg, directrice pour la France de l’American Jewish Committee, représentante spéciale de la France au processus de paix au Proche-Orient.

«Curieuse conception de « l’équilibre » que de nommer pour une telle mission la directrice d’une organisation partie prenante dans le conflit israélo-palestinien. Curieuse ambition pour la France que d’associer la représentante en France d’une organisation américaine aux discussions avec les États-Unis et l’Union européenne.
Curieuse conception lorsque l’organisation en question se targue d’être engagée aux côtés de la puissance occupante, alors même que Tel-Aviv poursuit l’occupation des territoires palestiniens, bafoue les droits humains les plus élémentaires et ne projette que la guerre contre ceux qui refusent de se plier à sa domination coloniale.

La prolifération d’une littérature arabophobe et islamophobe

Pas un jour ne passe sans qu’un ouvrage n’annonce des révélations sur les islamistes, objet certes de préoccupations des spécialistes mais dernier thème à la mode des marchands de sensation, pas un jour sans qu’un «islamologue», ces personnes qui se déclarent spécialistes de l’Islam, n’apparaisse sur les écrans de télévision pour donner sa propre explication du «phénomène du terrorisme islamiste» ou de l’arriération du monde arabe.

Cette littérature se nourrit d’ailleurs de l’actualité particulièrement abondante en ce domaine, dont les derniers en date sont le carnage de Charlie Hebdo et du Paris Bataclan (2015), de l’aéroport de Bruxelles (2016), enfin Nice (juillet 2015) et Berlin décembre (2016).

Les Arabes eux-mêmes ne se privent pas non plus de la nourrir par l’étalage de leur division, et beaucoup de commentateurs occidentaux ont puisé dans les divisions du Monde arabe la justification à leurs analyses ou à leurs préjugés anti-arabes.

Certes, les Arabes sont pour des raisons multiples responsables de la situation déplorable dans laquelle ils se trouvent. Mais la profusion d’experts occidentaux est impressionnante, voire même préoccupante, au point de se demander si certains experts ne souhaitent mettre à profit ce regain d’intérêt pour la sphère arabo-musulmane pour y consacrer des stéréotypes dans l’imaginaire occidental.

Avec l’aide des porte-serviettes de l’ancienne puissance coloniale, ces larbins de sinistre mémoire.

Après le romancier français Michel Houellebecq, qui avait jugé «stupide» la religion musulmane, l’italienne Oriana Fallaci, qui avait dénoncé la saleté et l’arrièrisme des Arabes, et l’aveu d´un grand journaliste français Claude Imbert, directeur de l’hebdomadaire «Le Point», se déclarant «islamophobe» un ouvrage collectif, réalisé par une soixantaine d’universitaires français et arabes, consacré à «L’Islam en France», et édité par «Les Presses Universitaires de France» (PUF), apporte une touche intellectuelle et scientifique à cette nouvelle xénophobie anti-arabe.

Numéro hors série de la revue «Cités», la publication illustre sa couverture par une gravure reproduisant un musulman au nez crochu, tenant le Coran par la main et tournant le dos à la République.

Curieux retournement des choses : l’ancien stéréotype d’identification des Juifs est désormais applicable aux Arabes et aux Musulmans. Curieux procédé qui consiste sous couvert de critique à pratiquer le dénigrement, sous couvert de lutte contre l’anti-sémitisme à favoriser un anti-arabisme.

Plus regrettable est que cette publication ait été cautionnée par un professeur de philosophie de la prestigieuse université parisienne «La Sorbonne», mais l’universitaire en question, Yves Charles Zarka, pense au contraire travailler à la mobilisation des esprits en France, qu´il considère comme le principal champ de bataille du conflit entre l’Occident et l’Islam.

«Face à l’esprit de conquête, il faut développer l’esprit de résistance», écrit-il, en affirmant que la France est menacée par «la constitution d´une minorité tyrannique» qu’il importe de combattre.

Il ressort de la lecture de cet ouvrage le fait que l’image de l’Arabe se réduit à quelques images fortes, (délinquance, fanatisme, antisémitisme). Sous l’apparence scientifique, l’analyse est simpliste, sans que ces intellectuels n’aient jugé bon de se pencher sur les véritables raisons de la violence anti-occidentale du monde arabo-musulman, ou de la xénophobie anti-arabe ou musulmane des occidentaux.

L’auteur fera grâce aux lecteurs des embardées répétitives et de leur impunité corrélative d’ Eric Zemmour, pape de la nouvelle doxa xénophobe française, d’Alain Finkielkraut (l’équipe de France de foot black, black, black, risée de l’Europe), son viatique pour l’Académie Française, de même que celles les deux éditorialistes vedettes du «Figaro», Yvan Rouffiol sur le «nazi-islamisme» et d’Alexandre Adler sur le «fascisme vert».

La neutralité, l’objectivité et l’impartialité, qui caractérisaient jadis le travail universitaire, ne sont plus de mise face à la violence de la bataille, dont la polémique sur le port du foulard islamique et le tollé suscité par les biens pensants de l’équipe de l’hebdomadaire satirique Charlie hebdo, autour de Philippe Val, à propos des caricatures de Mahomet, l’hiver 2006, n’en sont que les derniers avatars.

À noter qu’aucun de ces ouvrages, ni celui de Houellebecq, ni celui de Fallaci, pas plus que la revue «Cités», n’a fait l’objet d’une censure ou ses auteurs poursuivis en justice pour incitation à la haine raciale. Il n’en est pas de même pour les écrivains de l’autre bord.

L’exaspération du débat est telle que par un effet de transposition, toute critique vive de la politique israélienne, qu’elle émane d’arabes, de musulmans ou même d’intellectuels ou de personnalités de tradition culturelle ou religieuse juive, est assimilée à de l’anti-sémitisme.

Le CRIF, un lobby électoraliste occulte de l’extrême droite israélienne.

Bien pire, Le CRIF, le Conseil Représentatif des Institutions Juives de France, qui se doit, en tant qu’instance d’intermédiation auprès des pouvoirs publics, favoriser la cohésion nationale et le dialogue interreligieux, dénature son rôle en se plaçant à l’avant garde de la lutte anti-arabe.

M. Roger Cukiermann, du temps où il présidait le CRIF, s’était ainsi félicité publiquement, sans être désavoué, du succès du chef de l’extrême droite française, Jean Marie Le Pen, aux élections présidentielles de 2002, en considérant qu’il s’agit d’une «bonne leçon aux Arabes».

Nulle personnalité de premier plan française, ni politique, ni religieuse, n’a émis une protestation à cette occasion.

De même, lorsque des organisations juives organisent des concerts de gala pour récolter de l’argent pour l’armée israélienne et «le bien être du soldat juif», nul, non plus, ne se hasarde à critiquer cette opération de promotion d’autant plus inopportune et provocante que son principal bénéficiaire apparaît, tout de même, au regard du Droit international, comme une «armée d’occupation» en Cisjordanie, à Gaza, en Syrie et au Liban.

Pas une critique non plus quand Israël se livre à une destruction systématique du Liban, en violation flagrante du Droit Humanitaire International, en représailles à une capture de deux soldats israéliens au sud-Liban, alors que les Israéliens détiennent arbitrairement plusieurs milliers de prisonniers arabes, Palestiniens, Libanais et Jordaniens. Ibidem pour les offensives répétitives contre Gaza.

Indice complémentaire de la dégradation du sens civique national, pas une objection n’a été soulevée pour contester la qualité de

«Français» au caporal Shalit, «le nouveau soldat Ryan» des temps modernes.
Plus grave, nul dans la classe politique ou la presse ne s’est hasardé à soulever le problème de la dualité d’allégeance des binationaux franco-israéliens dans l’exercice de responsabilités politiques ou militaires en France ou en Israël, particulièrement en temps de guerre.

Le Quai d’Orsay a donné à savoir à diverses reprises qu’il s’impliquait dans la libération du sous officier israélien, –non pas tant pour des raisons humanitaires ce qui peut paraître concevable, mais du fait de sa «nationalité française»–, omettant de préciser que ce citoyen se trouvait en opération de guerre dans une armée étrangère contre un peuple supposé ami de la France, le peuple palestinien.

C’est le «sang mêlé» Nicolas Sarkozy qui a institué le parrainage du dîner annuel du CRIF sous le patronage du Président de la République, au mépris du principe de laïcité et de neutralité de l’État, alors que jusqu’à présent cet événement était présidé par le ministre de l’Intérieur en sa qualité de ministre des Cultes.
Le CRIF n’a pas attendu cette sollicitude pour faire la police à l’égard de toute opinion dissidente, y compris au sein des intellectuels de culture ou de religion juive.

C’est ainsi que coup sur coup, le sociologue Edgar Morin, qui s’était désolidarisé de la politique du gouvernement d’Ariel Sharon, de même que le politologue américain Norman Finkelstein, qui avait rédigé un ouvrage sur «l’industrie de l’holocauste», qui constitue une «réflexion sur l’exploitation de la souffrance des juifs», ont été poursuivis en justice par l’association France-Israël pour diffamation à l’égard d’Israël.

L’humoriste franco-camerounais Dieudonné a payé au prix fort le fait d’avoir caricaturé l’extrémisme de Sharon, en adaptant le salut nazi «Heil Hitler», en «IsraHeil». Interdit d’accès des salles de concert de France, il a été poursuivi en justice «pour incitation à une haine à caractère racial».

«La dernière passion du Christ», le film de Mel Gibson relatant le crucifixion de Jésus Christ, en est la dernière manifestation. Les grands producteurs français en ont refusé sa commercialisation au motif qu’elle relançait la responsabilité des juifs dans la mort du Christ et favorisait un renouveau de l’antisémitisme.

L’auteur fait aussi grâce aux lecteurs du révisionnisme anti arabe de Philippe Val, son tremplin vers la direction de l’audiovisuel public, de même que du psychodrame Siné, un des fondateurs de la revue satirique Charlie hebdo, déclenché par une dénonciation abusive d’antisémitisme par Claude Askolovitch, la grande conscience de gauche et ami de Manuel Valls, de même que des imprécations quasi quotidiennes de la «féministe» Caroline Fourest.

Il en va de même des statistiques carcérales d’Eric Zemmour sur la sur représentation des Arabes et des Noirs dans les prisons françaises, omettant soigneusement la criminalité en col blanc, précisément par ce qu’elle est le fait de «blancs» ou les jérémiades de la nouvelle coqueluche médiatique, Raphael Glucksman, intronisé «philosophe» par la caste journalistique comme pour suggérer une transmission héréditaire des diplômes par héritage paternel, empli du souillure de la «honte», à la chute du bastion djihadiste d’Alep, mais sans le moindre remord sur le martyre palestinien.

Sur ce lien les erreurs chroniques d’Eric Zemmour

Comme si les actes de quelques rabbins qui passent pour avoir ordonné, il y a deux mille ans, la mort de Jésus engageaient la responsabilité de tous les Juifs, religieux ou athées, pour l’éternité et à travers le temps, de la même manière que les attentats anti-occidentaux d’Al-Qaida ou de toute autre organisation ne sauraient rejaillir sur tous les Arabes et tous les Musulmans, condamnés par l’opinion occidentale à en assumer la responsabilité pour l’éternité.

Sur l’israélisation de la société israélienne :

René Naba

Journaliste-écrivain, ancien responsable du Monde arabo musulman au service diplomatique de l'AFP, puis conseiller du directeur général de RMC Moyen-Orient, responsable de l'information, membre du groupe consultatif de l'Institut Scandinave des Droits de l'Homme et de l'Association d'amitié euro-arabe. Auteur de "L'Arabie saoudite, un royaume des ténèbres" (Golias), "Du Bougnoule au sauvageon, voyage dans l'imaginaire français" (Harmattan), "Hariri, de père en fils, hommes d'affaires, premiers ministres (Harmattan), "Les révolutions arabes et la malédiction de Camp David" (Bachari), "Média et Démocratie, la captation de l'imaginaire un enjeu du XXIme siècle (Golias). Depuis 2013, il est membre du groupe consultatif de l'Institut Scandinave des Droits de l'Homme (SIHR), dont le siège est à Genève et de l'Association d'amitié euro-arabe. Depuis 2014, il est consultant à l'Institut International pour la Paix, la Justice et les Droits de l'Homme (IIPJDH) dont le siège est à Genève. Editorialiste Radio Galère 88.4 FM Marseille Emissions Harragas, tous les jeudis 16-16H30, émission briseuse de tabous. Depuis le 1er septembre 2014, il est Directeur du site Madaniya.

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