Dernière mise à jour le 7 octobre 2018
«Sans l’Afrique, la France n’aura pas d’histoire au XXIe siècle»- François Mitterrand, 1957.
«Sans l’Afrique, la France descendra au rang de puissance du tiers [monde]» Jacques Chirac, 2008.
La République Démocratique du Congo, un pays qui n’a jamais connu de transition démocratique
La République Démocratique du Congo (RDC), le plus grand pays d’Afrique subsaharienne (2,3 millions de km2) aborde une étape cruciale de son processus électoral, avec le dépôt des candidatures à l’élection présidentielle qui doit se tenir le 23 décembre.
Parmi les candidats pressentis figurent Jean-Pierre Bemba, un opposant en exil, et Moïse Katumbi Chapwé, président du prestigieux club de Footbal Mazembé. Le retour de ces deux figures de l’opposition congolaise a fait l’effet d’un séisme politique pour le président en fonction, Joseph Kabila, hors mandat depuis la fin de son second mandat le 20 décembre 2016.
Fils du principal gestionnaire financier de l’ancien président Mobutu, dont il est apparenté par alliance, Jean Pierre Bemba (56 ans), fondateur du Mouvement de Libération du Congo, a été incarcéré par la Cour Pénale internationale pendant près de dix ans pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité avant d’être acquitté en 2018. Le retour au pays natal, le 1 er Aout 2018, de cette figure emblématique de l’opposition en RD Congo devrait considérablement rebattre les cartes politiques dans le pays à cinq mois des élections générales.
Moïsé Katumbi Chapwé : Ancien gouverneur de la riche province du Katanga, président du tout puissant Mazembe, club de football congolais, sacré cinq fois champion d’Afrique et finaliste de la Coupe du monde des clubs en 2010, Moisé Katumbi Chapwé (54 ans), a été désigné candidat à la présidence par les opposants du G7, une coalition de sept partis de l’opposition politique congolaise.
Retour sur ce pays qui n’a jamais connu de transition démocratique depuis l’eviction de son chef charismatique et père de son indépendance, Patrice Lumumba, éjecté du pouvoir par le sergent Mobutu agissant pour le compte des services occidentaux.
Le Clan Kabila
Le Clan Kabila n’a rien à envier à celui de son prédécesseur Joseph Désiré Mobutu et rivalise avec lui pour figurer comme l’un des grands kléptocrates d’Afrique, à l’instar des grands pilleurs du continent notamment Omar Bongo (Gabon), Hissène Habre (Tchad), Sani Abacha (Nigeria) ou encore Théodore Obiang (Guinée équatoriale).
Joseph Kabila aurait du quitter le pouvoir en décembre 2016, soit depuis dix huit mois. Mais l’héritier s’accroche, suscitant une fronde populaire ayant conduit le pouvoir congolais à s’attaquer aux églises, alors que le désordre ambiant a fait résurgir le sceptre de la recrudescence de l’épidémie EBOLA et que l’espérance de vie des Congolais a chuté de 10 ans, passant de 59 ans à 49 ans, en un quart de siècle (1990-2014).
2e pays par l’importance de sa superficie en Afrique, regorgeant de richesses, la République Démocratique du Congo est, paradoxalement, l’un des pays les plus pauvres de la planète.
Le Congo Kinshasa produit 60 % de la production mondiale du cobalt, métal qui entre dans la fabrication des smartphones et des voitures électriques. Il figure à ce titre comme un marché prometteur pour l’avenir. Essentiellement produit dans l’ex province sécessionniste du Katanga, son exploitation est assurée par deux entreprises chinoises et par l’anglo suisse GLENCORE et ses 107 sociétés off shore, dont le principal interlocuteur n’est autre que le clan Kabila.
Le clan Kabila a en effet bâti un réseau d’entreprises qui s’étend à tous les secteurs de l’économie congolaise. Selon l’agence économique américaine Bloomberg News, ce trafic rapporte des millions de dollars à la famille, alors qu’en contrechamps, 90 % des Congolais vivent sous le seuil de la pauvreté et que 50 % n’ont pas accès à l’eau potable.
Kabila en République Démocratique du Congo, c’est «Razzia sur la chnouff», la version argotique de «Main basse sur la ville»
La fortune du clan s’élève à 15 milliards de dollars contre 4,5 milliards pour le budget national. L’épouse de Joseph Kabila, ses deux enfants et 8 de ses frères disposent de 120 permis d’exploitation des gisements : Or, Diamant, Cobalt, Cuivre, ainsi que d’autres minerais de la République Démocratique du Congo.
Outre les minerais, le clan Kabila s’impose dans les banques, l’agriculture, la distribution des carburants, le transport aérien, l’hôtellerie, la fourniture de produits pharmaceutiques et des boites de nuit.
Des entreprises du clan Kabila sont installées en outre aux Etats Unis et en Tanzanie et leurs avoirs sont placés dans deux paradis fiscaux : Panama et l’Ile de Nuie, selon l’agence d’Eva Lacoste intitulée «Le Clan Kabila : Un empire économique parue dans Golias Hebdo N° 513 Semaine du 1 er au 7 Février 2018.
À l’arrière plan des troubles, l’épidémie de l’Ebola a fait son apparition en RDC. Kinshasa a officiellement annoncé mardi 30 juillet la fin de la neuvième épidémie de la maladie à virus Ebola sur le sol congolais qui a tué 33 personnes pour 54 cas dans le nord-ouest du pays. Mais une mystérieuse fièvre a fait, parallèlement, son apparition dans la région de Béni (Nord Kivu), où 43 cas de fièvre hémorragique ont été détectés, dont 13 confirmés, une semaine seulement après la fin annoncée de la précédente épidémie dans le pays.
Un parapluie juridique pour Joseph Kabila
Prudent, Joseph Kabila a voulu se mettre à l’abri du besoin alors qu’il a pillé le pays et s’assurer en même temps d’une impunité qui lui épargnerait des poursuites pour sa forfaiture. Pour ce faire, il a fait voter par le Sénat de la République démocratique du Congo (RDC), le 25 juillet 2018, une loi sur «le statut et la protection d’anciens présidents élus du pays,» dont il sera le principal et premier bénéficiaire. Indépendante depuis 1960, la RDC a connu quatre chefs d’État (Joseph Kasavubu, Joseph Désiré Mobutu, Desiré Kabila enfin Joseph Kabila, dont trois «non élus» déjà décédés.
Outre un statut de sénateur à vie, cette loi donne droit à un ancien président élu des honneurs dans toutes les cérémonies, un personnel de protection et de domestique, une logistique nécessaire pour se mouvoir, une pension spéciale à un taux d’au moins 50 % de son ancien salaire mensuel, enfin la garantie de sa jouissance de ses droits politiques et civils. Selon le sénateur d’opposition Jacques Djoli, «cette loi va réduire le taux de délinquance constitutionnelle et dissuader ceux qui seraient tenté par un troisième mandat». Autrement dit, Joseph Kabila va troquer son impunité et son immunité en contrepartie de sa renonciation à un 3e mandat. Drôle de mœurs.
Ce texte a été adopté à six mois de la présidentielle censée élire le successeur au président Joseph Kabila au pouvoir depuis 2001 et dont le dernier mandat a expiré le 19 décembre 2016.
Certes sous la pression de ses parrains régionaux, notamment l’Angola, Joseph Kabila a finalement décidé de renoncer à briguer un nouveau mandat pour l’élection présidentielle prévue le 23 décembre, mais il a désigné comme dauphin son ancien ministre de l’intérieur, Emmanuel Ramazani Shadary le responsable du parti présidentiel, le PPRD, surnommé «coup pour coup» par référence à son tempérament d’une grande mansuétude.
En s’engageant à quitter le pouvoir, M. Kabila réalise, en dépit de ces manigances électoralistes, quelque chose d’inédit dans l’histoire de la République démocratique du Congo (RDC), immense pays instable, gorgé de ressources minérales, et où les transitions se sont toujours produites dans la violence, en 1965, en 1997 et en 2001.
Trois opposants ont déposé leur candidature : Jean Pierre Bemba, Félix Tshisekedi et l’ancien président de l’Assemblée nationale Vital Kamerhe. Tous trois envisagent à terme une candidature unique de l’opposition pour cette élection présidentielle à un tour. Mais la candidature de six des 25 postulants à l’élection présidentielle dont celle de l’ex chef rebelle Jean Pierre Bemba a été jugée «irrecevable», vendredi 24 août par la commission électorale qui a justifié sa décision en raison de sa «condamnation par la Cour pénale international pour subornation de témoins».
Sur les manigances électorales en RD Congo, cf à ce propos «Khamal, le libanais qui souffle à l’oreille de Joseph Kabila»
Dans un ultime pied de nez à ses censeurs occidentaux, le président congolais a exigé depuis la tribune des Nations Unies, le 22 septmebre 2018, le «début effectif» d’un retrait des casques bleus du Congo. La Monusco, qui compte quelque 17.000 hommes pour un budget annuel d’1 milliard de dollars, est l’une des plus importantes missions de paix des Nations Unies dans le monde. En janvier 2018, Joseph Kabila avait déjà réclamé que la force quitte le pays, «au plus tard en 2020», espérant mettre cet exploit à son actif.
La richesse du Président Obiang
Il en est du clan Kabila comme de celui du président équato guinéen : La richesse du président Obiang et de sa famille semble provenir pour une bonne part du trafic international de drogue.
En février 1997, l’International Narcotics Board, dans son rapport officiel, plaça la Guinée équatoriale parmi les neuf narco-États africains. La Dépêche internationale des drogues, publiée par l’observatoire géopolitique des drogues de Paris, publia en août de la même année : «Depuis 1988, plus d’une dizaine de diplomates ou membres de la famille présidentielle ont été arrêtés à cause du trafic des drogues dans différents pays.».
Selon Le Los Angeles Times, de grandes compagnies pétrolières américaines payaient des revenus directement sur un compte détenu, sous le contrôle du président, à la Riggs Bank, basée à Washington DC, alors que le magazine Forbes assurait , de son côté, qu’Obiang était l’un des chefs d’État les plus riches du monde.
Le 18 juin 2007, le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire à l’encontre de Teodoro Obiang, Denis Sassou Nguesso, Omar Bongo, Blaise Compaoré et José Eduardo Dos Santos et leur entourage, accusés par trois associations françaises (Survie, Sherpa) de «recel de détournement de fonds publics».
Le chef de l’État guinéen et sa famille possèdent, en région parisienne, plusieurs biens mal acquis supposés, dont au moins une propriété au nom de Teodoro Obiang Nguema et «onze véhicules (incluant deux Bugatti Veyron, une Ferrari Enzo, une Maserati MC12 et une Ferrari 599 GTO) au nom du fils du président, Teodorín Nguema Obiang, pour un montant estimé de plus de 5,7 millions d’euros, acquittés par des virements de sociétés intermédiaires.
Mobutu passera à la postérité pour deux tâches indélébiles :
- L’assassinat de Patrice Lumumba, figure mythique de l’Indépendance du Congo ex Belge, qu’il supervisa en sa qualité de sous traitant de la CIA, du temps ou il était sergent de la jeune armée congolaise, un assassinat qui le propulsera au rang de général.
- Le fait d’avoir été interdit d’accès sur le territoire français, en phase terminale de sa vie, au terme d’une existence consacrée à abonder la classe politique française de djembes et de mallettes. Le dictateur sera refoulé et terminera sa vie au Maroc où il est enterré.
Une fin qui devrait servir de leçons aux dictateurs africains gonflés de vanité à se targuer de leur proximité avec les dirigeants français.
Pour aller plus loin
La fortune du prédécesseur du Clan Kabila, Joseph Désiré Mobutu
http://negronews.fr/culture-tout-sur-la-fortune-de-mobutu/
Et sur le bradage de la richesse africaine
L’Afrique, le dernier eldorado et le pillage du Coltan
https://www.madaniya.info/2018/03/27/afrique-le-dernier-eldorado-ou-le-continent-pille/
https://www.madaniya.info/2016/04/25/fonds-vautours-bradage-terres-arables-fond-d-evasion-de-capitaux/
https://www.madaniya.info/2015/06/21/israel-et-larabie-saoudite-deux-grands-colonisateurs-de-la-planete/
Pour compléter votre bibliothèque africaine
À propos du Congo ex-belge
http://www.les7duquebec.com/7-dailleurs/republique-democratique-du-congo-dans-lenfer-du-cobalt/
http://1nfo.net/137950
Rififi entre les oulémas du Sénégal et les Francs-Maçons de France
https://beninwebtv.com/2018/01/senegal-bras-de-fer-entre-senegal-loge-francaise-de-franc-maconnerie/
https://en.wikipedia.org/wiki/Congo_Free_State_propaganda_war
Une des genèses. Du temps ou le Congo belge était la propriété personnelle du roi Léopold II.