La Jordanie et l’Iran poussent Israël à la guerre contre l’Égypte nassérienne et la Syrie baassiste (4/4)

La Jordanie et l’Iran poussent Israël à la guerre contre l’Égypte nassérienne et la Syrie baassiste (4/4)

La Jordanie et l’Iran poussent Israël à la guerre contre l’Égypte nassérienne et la Syrie baassiste (4/4) 1920 1144 La Rédaction

Dernière mise à jour le 25 juin 2021

Par Said Al Sabbah, écrivain libanais. Adaptation en version française René Naba https://www.madaniya.info/

Quatre des principaux protagonistes de ce drame, –le Roi Faysal d’Arabie saoudite, le premier ministre israélien Yitzhak Rabin, le premier ministre de Jordanie Wasfi Tall et le président Anouar El Sadate– tous alliés de premier plan des États-Unis, dont deux prix Nobel de la Paix (Rabin et Sadate) auront été assassinés, alors que la République Islamique d’Iran se muait en chef de file du combat pour la libération de la Palestine et de la libération du Moyen orient de la tutelle israélo-américaine.

Note de la rédaction

Le 4eme volet de ce dossier, œuvre de l’écrivain libanais Said Al Sabbah, constitue une synthèse condensée de deux ouvrages rédigés par des universitaires arabes, le premier «Les Guerres d’Égypte à travers les archives israéliennes» du chercheur égyptien Mohamad Al Bouheiry, le second «Le rôle de l’Iran dans la guerre de 1967», du docteur Mohamad Mouhareb.

Le titre général de cette étude parue dans le quotidien libanais de langue arabe «Al Akhbar», en date du 3 octobre 2019, est le suivant: «Comment le Roi Hussein de Jordanie et le Chah d’Iran Réza Phalévi ont incité Israël à frapper l’Égypte et le Syrie, à la veille de la guerre de juin 1967».

I- Le rôle incitatif de la Jordanie.

L’Arabie saoudite s’est positionnée en fer de lance du combat contre l’Égypte nassérienne et la Syrie baassiste au plus fort de la guerre contre le nationalisme arabe mené conjointement par les États-Unis et Israël en ce que les régimes républicains arabes bordant le bassin historique de la Palestine (Égypte et Syrie) portaient la responsabilité de la guerre contre Israël, pour la libération de la Palestine.

La guerre dérivative du Yémen menée par le Royaume wahhabite contre l’Égypte, soutien des Républicains contre l’Imamat, répondait à cet objectif, de même que la mise sur pied ultérieure d’un «pacte islamique» par le Roi Faysal d’Arabie saoudite, dans la foulée de l’incendie de la Mosquée Al Aqsa de Jérusalem.

Au plus fort de la rivalité égypto-saoudienne, l’entrée en scène des Fedayins palestiniens depuis le front oriental du Monde arabe a placé dans l’embarras la Jordanie, particulièrement le Roi Hussein. A l’instar de son grand père le Roi Abdallah, –assassiné en pleine mosquée d’Al Aqsa à Jérusalem, en 1948, pour avoir entretenu des relations clandestines avec les sionistes du temps du mandat britannique sur la Palestine–, le monarque hachémite entretenait des relations secrètes avec les Israéliens depuis 1963 et s’appliquait méthodiquement à brider la guérilla palestinienne.

La Jordanie considérait que la Syrie constituait l’obstacle majeur à la pérennisation de l’arrangement conclu entre Israël et la Jordanie pour maintenir le calme à la frontière jordano-israélienne. Peu de temps avant l’opération israélienne d’Al Soummouh (1), Hussein adressa un message aux Israéliens, partiellement codé, les assurant qu’un raid rapide contre la Syrie ne romprait pas le calme sur le Front Nord et que l’Égypte, en dépit d’un accord de défense commune avec la Syrie, ne volerait pas à son secours (2).

L’opération Al Soummouh a mis en colère le Roi Hussein car il souhaitait vivement instaurer des relations cordiales et secrètes avec les Israéliens. Il déployait pour ce faire de grands efforts pour entraver toute action de la guérilla palestinienne contre l’état hébreu.

L’opération Al Soummouh a suscité en outre la colère des Américains qui se sont posés la question suivante: «Pourquoi les Israéliens ont attaqué un allié proche des Etats-Unis, alors que Washington avait donné son feu vert à une attaque contre la Syrie?

«Pourquoi n’avoir pas attaqué la Syrie»?, a ainsi interpellé un diplomate américain de haut rang un chef militaire israélien, lors de sa visite en Israël après l’opération Al Soummouh. «Pourquoi avoir choisi de porter atteinte à un état ami et allié de l’Occident (3)?, a poursuivi le diplomate américain, en quête d’une explication convaincante.

2-Le rôle incitatif du Chah d’Iran

La présence militaire égyptienne au Yémen était «préoccupante» pour l’Iran qui redoutait un accroissement de l’influence nassérienne dans la Péninsule arabique (Arabie Saoudite-Yémen), qui constituerait par voie de conséquence une menace pour la sécurité nationale iranienne.

Pour conjurer cette menace, le Chah d’Iran a entrepris deux démarches, l’une en direction d’Israël, l’autre en direction de l’Union soviétique.

A- En direction d’Israël:

Le Chah s’est appliqué à inciter Israël à se livrer à une action militaire contre l’Égypte en vue de la contraindre à retirer ses troupes du Yémen et à les concentrer sur le front israélien.

Parallèlement, le Chah s’est employé à faire pression sur l’Union Soviétique en vue d’obtenir que cette dernière contraigne l’Egypte à se retirer du Yémen (4) et de «distraire» la Syrie pour l’empêcher de soutenir l’Égypte.

La visite d’Yitzhak Rabin en Iran le 14 avril 1967, soit moins de deux mois avant la guerre de Juin 1967, constitue à cet égard la plus importante visite jamais effectuée par un responsable israélien en Iran (5).

Durant son séjour à Téhéran, le chef d’état-major israélien a non seulement rencontré le Chah, mais s’est également entretenu avec le premier ministre et surtout avec les chefs militaires et les responsables de l’appareil sécuritaire iraniens.

Le thème général des entretiens a été l’aménagement d’une coopération stratégique entre l’Iran et Israël, deux alliés majeurs des États-Unis au Moyen-Orient, en vue de faire face à l’Égypte. En contrepartie, Rabin a demandé à l’Iran d’accroitre ses fournitures de pétrole iranien à Israël, qui représentaient déjà 85 pour cent des besoins énergétiques israéliens (6).

Le chah a attiré l’attention de Rabin sur le fait que «la présence égyptienne au Yémen entravait le déploiement de l’influence iranienne dans la Péninsule arabique et constituait de ce fait une menace pour le Monde arabe et par voie de conséquence pour Israël.

En conclusion, le Chah a estimé qu’il était «de l’intérêt commun de l’Iran et d’Israël d’occuper l’armée égyptienne dans d’autres endroits et d’occuper la Syrie pour l’empêcher de voler au secours de l’Égypte» (7)

Ami Jalouska (8) évoque à ce propos le rôle de l’Iran dans l’exacerbation de la tension en pratiquant une «politique du bord du précipice», faisant fuiter de fausses informations à caractère stratégique à l’Union Soviétique à propos de prétendues intentions israéliennes de se livrer à une attaque subite contr ela Syrie.

Ce fait a mis en colère Nasser qui ordonna alors un mouvement des troupes égyptiennes en signe de solidarité avec la Syrie. Le jeu iranien a contribué à précipiter la guerre, engageant l’Égypte dans un conflit auquel elle n’était pas préparée.

La guerre de Juin 1967 a pleinement satisfait les objectifs stratégiques de l’Iran, en réduisant l’influence de l’Égypte dans la zone pétrolière du Golfe et sa substitution par l’Iran (9).

B- En direction de l’Union Soviétique:

Le Chah s’est appliqué à convaincre l’Union soviétique de faire pression sur l’Égypte pour contraindre ce dernier pays à se retirer du Yémen et de lbrider son influence dans la Péninsule arabique en leur miroitant un marché mirobolant.

a) Les entretiens d’Yitzhak Rabin, chef d’état-major israélien à Téhéran:

Le Chah a tenu les propos suivants à Yitzhak Rabin: «J’ai précisé aux soviétiques que leurs intérêts en Iran étaient aussi importantes que leurs intérêts en Égypte. J’ai en conséquence conclu d’importants accords économiques et commerciaux avec l’URSS dans les domaines énergétiques (pétrole et gaz), l’installation d’usines russes en Iran en plus de contrats d’armement.

Le Chah a expliqué à Rabin sa démarche en faisant valoir que ce développement des rapports irano-soviétiques dans le domaine économique avait surpris les Etats-Unis. Mais qu’il avait pris cette décision afin d’inciter Moscou à «réfléchir quant à l’opportunité de poursuivre sa coopération avec l’Égypte et de mettre en balance les intérêts soviétiques tant en Iran qu’en Égypte» (10).

Malheureusement pour le Chah, Moscou n’a pas prêté une grande attention aux propos du souverain iranien.

b)- La lettre du Roi Faysal d’Arabie au président Lyndon Johnson

Aux démarches du Chah d’Iran et du Roi Hussein de Jordanie se sont superposées celle du Roi Faysal d’Arabie saoudite. Le souverain wahhabite a en effet adressé un message à Lyndon Johnson, en date du 23 novembre 1966, dans laquelle il demandait au président américain de «suggérer» à Israël de «se livrer à une action militaire contre l’Égypte de Nasser».

Épilogue

Le Chah d’Iran, l’un des plus farouches adversaires de Nasser, sera évincé du pouvoir en 1979 par une révolte populaire, l’année de la conclusion du traité de paix entre Israël et l’Égypte.

A la recherche d’un abri, l’Amérique refusera, paradoxalement, l’asile à son meilleur gendarme dans le Golfe. Au terme d’une longue errance, le Roi des Rois sera accueilli par l’Égypte, pays contre lequel il avait ardemment incité Israël à attaquer. La République Islamique d’Iran proclamée à son éviction, compensera stratégiquement la défection de l’Égypte du champ de bataille contre Israël, du fait de sa conclusion d’un traité de paix avec l’État Hébreu.

Le Roi Faysal d’Arabie saoudite connaitra son heure de gloire en 1973, en activant l’arme du pétrole, non pas tant en soutien à l’effort de guerre arabe contre Israel, selon la version pétromonarchique, mais en vue de fragiliser les économies de l’Europe occidentale et du Japon face à l’économie américaine sinistrée par le gouffre financier représenté par la guerre du Vietnam (1958-1975). Faysal sera néanmoins, à son tour, assassiné en 1975, par son propre neveu, diplômé des universités américaines, illustrant par la même la corrosivité de «l’American Way of Fife» pour les bédouins du désert.

Anouar El Sadate, l’homme qui s’est appliqué à gommer l’héritage de son mentor Gamal Abdel Nasser accueillera, en grand seigneur, le monarque iranien déchu, -un mégalomane ayant pourtant vigoureusement incité Israël à attaquer militairement l’Égypte en lui infligeant un sévére défaite militaire. Mais celui qui s’est auto-proclamé «président musulman d’un pays musulman» en vue d’activer le levier islamiste pour neutraliser les laïcs d’Egypte -Nassériens et Communistes-, sera à son tour assassiné par………un néo islamiste.

Nec plus ultra, Yitzhak Rabin, l’ancien chef d’état major israélien de la guerre de Juin 1967, l’interlocuteur privilégié du Chah d’Iran, devenu premier ministre et cosignataire du Traité de paix avec l’Égypte de Sadate, sera, à son tour, assassiné par…….un ultra sioniste.

Enfin, Le Roi Hussein de Jordanie, rompant la solidarité arabe au profit d’une connivence avec Israël, l’ennemi officiel du Monde arabe, organisera un bain de sang à Amman en septembre 1970 pour mater la guérilla palestinienne et assurer la survie du trône hachémite. Il traînera jusqu’à sa mort, au terme d’une longue maladie, en 2002, le qualificatif de «Boucher d’Amman.

Son âme damnée, le premier ministre Wasfi Tall, sera assassiné en 1971, un an après le septembre noir jordanien», au Caire par substitution de son Roi.

Au terme de cette séquence, cinq des principaux protagonistes de ce drame, -tous alliés de premier plan des Etats Unis, dont deux Prix Nobel de la Paix (Rabin et Sadate)-, seront dégagés de manière violente de la scène publique, dont quatre assassinats, alors que la République Islamique d’Iran se muait en chef de file du combat pour la libération de la Palestine et de la libération du Moyen orient de la tutelle israélo-américaine.

Quatre assassinats de grand pontes pro occidentaux (Fayçal, Sadate, Rabin Wasfi Tall)…Une histoire de cornecul

Références bibliographiques
  1. Opération Al Sommouh: Raid militaire israélien contre le village jordanien d’Al Soummouh en date du 13 novembre 1966, qui a provoqué la destruction complète du village, faisant de dizaines de victimes morts ou blessés, parmi les villageois ainsi que dans les rangs de l’armée jordanienne.
  2. «Les guerres d’Égypte à travers les documents israéliens» par Mohamad Al Bouheiry, page 122
  3. Ibidem tant pour la source que pour la page
  4. Etude du Docteur Mohamad Mouharreb: «Rôle de l’Iran dans la guerre de 1967».
  5. Ibidem pour la source.
  6. Ibidem pour la source
  7. Les guerres d’Égypte à travers les documents israéliens, page 131
  8. Amy Jalouska, colonel de réserve de l’armée israélienne, sa thèse de doctorat intitulée «Levy Eshkol donne tes ordres». Diplôme délivré par l’université israélienne. La version livre a été expurgée de certains passages pour des considérations relatives à la sécurité nationale israélienne.
  9. «Les guerres d’Égypte à travers les documents israéliens».
  10. «Le rôle de l’Iran dans la guerre de 1967» . M. Mouharreb
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2 commentaires
  • Rachid ELAÏDI 25 juin 2021 à 11h58

    ni le Chah d’Iran ni le roi de Jordanie n’étaient des comploteurs contre Nasser . Le Chah tenait à son pouvoir comme un enfant méfiant et même avait la même attitude que Nasser d’engager un bras de fer avec les islamistes ; Khomeini en est une preuve flagrante et puis quand Giscard ,président français, l’avait averti de la présence de Khomeini ,son véritable opposant , sur le sol français entrain de comploter sur le Chah, ce dernier l’avait négligeait et l’histoire courait son court . Et puis le Chah ne voyait pas plus que le bout de son nez ,il sa contentez de se faire valoir devant sa femme en se moquant des iraniens qui lui faisaient la courbette …donc le Chah n’a aucune de ces caractéristiques à comploter sur Nasser qui lui était un vrai comploteur. Le roi de Jordanie est aussi l’enfant gâté qui avait succédé à son père à l’age encore jeune pour un roi ; il avait appris le pouvoir sur le tas et il n’aimait pas les arabes car il s’est marié à une britannique et c’est son enfant Abdellah britannique de mère qui lui avait permis de lui succéder , d’autant plus , c’est lui qui était venu au Maroc en 1971 pour encourager l’autre roi Hassan II d’exécuter tous les officiers militaires qui avaient participé au coup d’État militaire de Skhirat qui est un gage de lâcheté et non d’un comploteur , certes, il maniait facilement son peuple donc il n’avait pas non plus ces caractéristiques d’un comploteur au rang de Nasser et donc il y avait un gène ressenti à l’égard de Nasser mais ils ne pouvaient comploter ou même supplier d’autres puissances de l’époque de faire ce travail ; car ce qui les intéressaient est justement de s’approcher plus d’Israël qui complotait tous les pouvoirs en place arabes et peur d’être complotés à leur tour ,ils préféreraient orienter Israël vers une focalisation sur Nasser ,alors que tous respectaient Nasser ; ils n’avaient pas le rang de Nasser

  • quelle conception naîve et infantile du pouvoir et des relations internationales de la part de rachid elaîdi une vrai autruche presque sourde aveugle et muette